đ 2022-11-17 18:59:38 â Paris/France.
MADRID, 17 novembre (EUROPA PRESS) â
SebastiĂĄn Lelio, rĂ©alisateur chilien qui a remportĂ© lâOscar du meilleur film en langue Ă©trangĂšre en 2017 pour « Une femme fantastique », prĂ©sente « El prodigio », un film avec Florence Pugh (« Ne tâinquiĂšte pas, ma chĂ©rie », « Black Widow »). Un film basĂ© sur le roman dâEmma Donoghuey qui, se dĂ©roulant dans un village ultra-catholique de lâIrlande du XIXe siĂšcle, oĂč une fillette de 11 ans affirme quâelle nâa pas mangĂ© depuis quatre mois et quâelle survit miraculeusement grĂące Ă la « manne du cielâ, puisquâil est disponible sur Netflix aprĂšs son passage Ă©phĂ©mĂšre dans les salles de cinĂ©ma.
« Câest un moment de transition que nous vivons, mais aussi de contradictions et de paradoxes. Le film nâexisterait pas sans Netflix, mais jâaurais aimĂ© quâil traverse plus de pays, plus de cinĂ©mas, plus de salles. .. pour bien sĂ»r. Mais en mĂȘme temps je leur suis trĂšs reconnaissant dâavoir pu le faire », reconnaĂźt le metteur en scĂšne dans une interview Ă Europa Press dans laquelle il rĂ©flĂ©chit Ă la nĂ©cessaire coexistence des thĂ©Ăątres et des plateformes traditionnels.
En ce sens, Lelio assure que le « dĂ©solé » quâil Ă©prouve que son dernier film « ne soit pas dans les salles partout depuis plus longtemps » est en partie compensĂ© par la « curiosité » qui lâĂ©veille du jour au lendemain votre film est disponible sur 240 millions dâĂ©crans grĂące Ă la plateforme. « Jâessaie de comprendre, moi aussi je suis nouveau lĂ -dedans », insiste le cinĂ©aste chilien, qui prend ses distances avec ces voix, certaines trĂšs autoritaires et prestigieuses, qui voient dans le « boom » du Streaming le dĂ©but de la fin de cinĂ©ma.
Partant dâune vision « non apocalyptique, mais intĂ©grĂ©e », le rĂ©alisateur espĂšre que petit Ă petit le panorama sâĂ©claircira et donnera lieu à « une relation plus hybride » qui, sans nier « la popularitĂ© et lâĂ©norme portĂ©e des plateformes », permettra lâexistence du cinĂ©ma dans les salles ». « Dans lâhistoire du cinĂ©ma, sa mort est dĂ©clarĂ©e depuis sa naissance. Il allait ĂȘtre tuĂ© par le son, la tĂ©lĂ©vision, la VHS, le cĂąble⊠et bien sĂ»r, Internet. Je crois que le cinĂ©ma dans les salles ne mourra pas, mais le sang coulera en cours de route », prĂ©dit-il.
Dans sa rĂ©flexion, Lelio met un accent particulier sur la protection et le soin de ce « petit cinĂ©ma, mĂȘme de la classe moyenne », qui est « acculé » sur le panneau dâaffichage par les gros blockbusters. « Je ne conçois pas une ville contemporaine sans salles de cinĂ©ma (âŠ) Mais il faut une multiplicitĂ© de regards et de lectures pour que le cinĂ©ma remplisse sa fonction », clame le rĂ©alisateur qui, revenant sur âEl prodigioâ, avoue que il Ă©tait « fasciné » dans Combien avez-vous lu le roman dâEmma Donoghue ?
« Jâai eu un lien Ă©motionnel avec Lib, lâinfirmiĂšre principale. Une femme rationnelle, scientifique et moderne qui est convoquĂ©e par un groupe dâhommes dâIrlande en 1862 pour observer, mais sans intervenir, une fille qui nâaurait pas mangĂ© depuis quatre mois. » dit-elle, la rĂ©alisatrice qui met en avant lâĆuvre « magnĂ©tique » et « presque envoĂ»tante » de Florence Pugh et aussi celle encore plus jeune de KĂla Lord Cassidy.
SCIENCES CONTRE. FANATISME
Deux personnages, souligne le rĂ©alisateur, qui « ont besoin de se sauver » et entre lesquels sâinstaure un lien de « sororité » qui se transforme peu Ă peu pour « devenir un amour presque maternel ». Une relation complexe dans un environnement radicalisĂ© et hostile, juste une dĂ©cennie aprĂšs la grande famine irlandaise, dans laquelle le personnage de Puig devra faire face « à un voyage de la raison pour affronter le fanatisme religieux et le dilemme moral de savoir quoi faire avec la fille ».
« Nous ne traitons pas de lâexistence ou non de Dieu, le film ne parle pas de cela. Il parle de deux maniĂšres de lire la rĂ©alitĂ© et du pouvoir de la fiction dans nos vies. De la façon dont les histoires, les histoires, deviennent un pouvoir politique et en contrĂŽle « , Lelio dĂ©fend que justement avec cette alerte il interroge le spectateur au dĂ©but et Ă la fin du film. Une sorte d' »avertissement » pour transfĂ©rer de lâautre cĂŽtĂ© de lâĂ©cran « la responsabilitĂ© de remettre en question ce que lâon croit » afin de « ne pas laisser nos croyances, notre religion ou notre idĂ©ologie penser Ă notre place ».
Ce sont, selon le rĂ©alisateur, les « forces » qui sâaffrontent dans âEl prodigioâ oĂč dâun cĂŽtĂ© se trouve « le fanatisme religieux de la communautĂ© qui a trouvĂ© sa vĂ©ritĂ©, opĂšre Ă partir de lĂ , dĂ©forme la rĂ©alitĂ© Ă partir de lĂ et est mĂȘme prĂȘt Ă une fille meurt pour maintenir le pouvoir que cette vĂ©ritĂ© leur donne » et dâautre part la « polyvalence et lâĂ©lasticitĂ© intellectuelle » de Lib, lâinfirmiĂšre principale « qui, parce quâelle est scientifique, a un plus grand rapport avec lâincertitude, la capacitĂ© dâadaptation et question ».
Un choc, celui de « cette Ă©lasticitĂ© et cette rigidité », qui est aussi « trĂšs 2022 ». « Le film a quelque chose de ça, de dire au spectateur âRĂ©veillons-nous ! Alerte ! Ne vous endormez pas devant le pouvoir de la fiction, pas mĂȘme du film lui-mĂȘme, mĂ©fiez-vous de lâhistoire, mĂȘme de celle-ci.â sens, le film essaie dâĂȘtre en lui-mĂȘme le problĂšme lorsquâil regarde en arriĂšre le spectateur pour lui demander quel genre de croyant il est, sâil croit en ce quâil croit, quâil soit rigide ou Ă©lastique », expose le rĂ©alisateur qui se dĂ©finit comme « élastique  » en essayant dâavoir une « attitude scientifique face Ă la rĂ©alité ».
« Je me mĂ©fie de toutes les histoires, mais en mĂȘme temps jâadmire toutes les histoires qui ont de la beauté », dit le rĂ©alisateur qui, dans âEl prodigioâ, prĂ©sente au spectateur une proposition trĂšs ambitieuse, intellectuellement, mais aussi visuellement, avec des mais des lieux imposants, une photographie rĂ©elle et soignĂ©e qui manie avec Ă©lĂ©gance le clair-obscur dâAri Wegner.
Atteindre prĂ©cisĂ©ment cet Ă©quilibre entre « honorer les thĂšmes quâil explore, qui sont dĂ©licats et durs devant lesquels on ne peut pas ĂȘtre frivole, et le plaisir visuel », Ă©tait le grand dĂ©fi de Lelio dans ce film. « Alfred Hitchcock a dit quâun film ne devait pas ĂȘtre un morceau de vie, mais un morceau de gĂąteau. Et je pense quâil y a une part de vĂ©ritĂ© lĂ -dedans, car trouver lâĂ©quilibre entre le plaisir esthĂ©tique et la douleur des thĂšmes Ă©tait le plus difficile (. ..) Nous voulions une splendeur esthĂ©tique et une acuitĂ© thĂ©matique et que les deux choses ne sâannulent pas », conclut-il.
SOURCE : Reviews News
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