đż 2022-09-25 16:31:53 â Paris/France.
Lâune des meilleures choses Ă propos de la culture du Streaming câest la possibilitĂ© de rĂ©cupĂ©rer, avec la distance qui sâimpose, des titres incompris du fait de lâĂ©phĂ©mĂšre du moment, des nuisances de la mondialisation et du manichĂ©isme capricieux des approches.
Tel est le cas de âHillbilly, une Ă©lĂ©gie ruraleâ, nĂ© pour ĂȘtre dĂ©testĂ© dĂšs la premiĂšre minute, peut-ĂȘtre parce quâil est trop amĂ©ricain, trop acadĂ©mique, trop destinĂ© aux guirlandes de tapis rouge⊠bien que, dans ce cas, ces caractĂ©ristiques que le film de Ron Howard fait emblĂšme et drapeau avec une saine impudence nâexclut pas lâexistence dâun cĆur, dâune empreinte propre, car sâil y a quelque chose de bon dans la culture yankee, câest sa fascination pour lâĂ©talage impudent de sa honte et la approfondissement presque masochiste dans les clairs-obscurs de son histoire trouble et complexe.
Quelques raisons dâaimer le film que les critiques « sĂ©rieux » ne veulent pas que vous voyiez
« Hillbilly », disponible sur Netflix, il serait prĂ©visible quâil soit ignorĂ© par une AcadĂ©mie de plus en plus obsĂ©dĂ©e par lâinclusivitĂ©, la discrimination positive, le cinĂ©ma bien intentionnĂ© et le politiquement correct, rejetant les grandes Ćuvres de ses principaux bastions, et ne mettrait en valeur que le travail de Glenn Close et le maquillage. Les Razzies, ou les anti-Oscars, nommeraient, faisant un duo malicieux et une histoire dĂ©routante, Ă©galement le travail de Close, mentionnant Ă©galement Howard comme rĂ©alisateur et vanessa taylor en tant que co-auteur, et arrondissant le non-sens.
Les critiques, de plus en plus polarisĂ©es, seraient amorcĂ©es par le film. Le spectateur ordinaire, en revanche, nâĂ©tait pas tout Ă fait dâaccord avec une telle meule, puisque les Ă©valuations que lâon peut en trouver sur Internet ne sont pas nĂ©gatives, bien quâelles ne soient pas non plus Ă redire ; a 6,7 ââsur Imdb et 82% sur Rotten Tomatoes (contre 25% des critiques). En bref, peu dâĆuvres rĂ©centes illustrent la confrontation entre les critiques et les tĂ©lĂ©spectateurs dâune maniĂšre aussi illustre et puissante que « Hillbilly »⊠dâautant plus que il y a une vingtaine dâannĂ©es cela aurait Ă©tĂ© un film-Ă©vĂ©nement qui aurait sĂ»rement Ă©bloui le premier et, peut-ĂȘtre par consĂ©quent, une grande partie de son public potentiel.
Bon, assez de cette haine. Je propose tout dâabord de me concentrer sur la carriĂšre de Ron Howard. Le garçon de âLa cour du pĂšre dâEddieâ a longtemps Ă©tĂ© considĂ©rĂ© comme une sorte de fils Ă moitiĂ© muet de la gĂ©nĂ©ration Spielberg, mĂȘme sâil suffit de regarder en arriĂšre pour sâapercevoir que il nây a pas de mauvais film. Certains ennuyeux, comme âApollo 13â, mais rien de mal. Dans sa premiĂšre Ă©tape, nous trouvons de trĂšs beaux titres tels que âNight shiftâ, âPisa a fondoâ, âCocoonâ, âLlamaradasâ, âUn horizon trĂšs lointainâ ou âBehind the newsâ. Et quelques notables⊠il y a âUn, dos, tres⊠¥Splash !â, le âWillowâ jamais assez louĂ© ou lâexemplaire âSweet home⊠somely !â.
Ă lâĂ©poque, le mignon et adorablement courant dominant Howard a jouĂ© dans le mĂȘme ligue que Robert Zemeckis ou Rob Reiner, mais dans un registre un peu plus bas. A lâhonneur de la vĂ©ritĂ©, il est vrai quâau cours de ces annĂ©es on nâa pas trouvĂ© dans sa dĂ©licieuse filmographie un titre issu du packaging de âThe Princess Brideâ ou âQui a encadrĂ© Roger Rabbit ?â. Ajoutez celui qui Ă©crit ceci : cela nâa pas non plus besoin dâĂȘtre fait. Ă partir de 1995, plus prĂ©cisĂ©ment avec le chĂątaignier de âApollo XIIIâ, Howard changera dâavis et jouera Prenez ça au sĂ©rieux.
Zemeckis et Reiner feraient les trois quarts de la mĂȘme chose, mais avec des rĂ©sultats infĂ©rieurs, ou bien infĂ©rieurs dans le cas de Reiner (rappelons-nous, ou mieux non, âHistory of oursâ). De lĂ , nous obtenons une poignĂ©e de films aussi discutables et discutĂ©s que brillant dans la formulation et le rĂ©sultat: entre autres, le multi-rĂ©compensĂ© âA Beautiful Mindâ, le fade mais solide âCinderella manâ, le brillant âRushâ ou lâextraordinaire âFrost vs. Nixonâ. Je ne me battrais pas avec des poings amĂ©ricains et des chaĂźnes pour « A Beautiful Mind », mais pour le film de Nixon, je le ferais certainement. Je ne tournerais pas non plus le dos Ă lâescape cinema, comme en tĂ©moignent le sympathique et profond « Quel dilemme ! », ses adaptations des best-sellers horrifiants de Dan Brown (le premier Ă©tait loufoque, le second jouissif, le troisiĂšme simplement amusant) et son incursion mal reçue dans lâunivers de Star Wars avec le fabricant de pop-corn docile âHan Soloâ. Presque rien.
Et tout cela nous ramĂšne au « Hillbilly », cinĂ©ma cent pour cent amĂ©ricain : pour le meilleur, pour le pire, pour nâimporte quoi. Plus dâinformation : « hillbilly » est un terme pĂ©joratif utilisĂ© pour dĂ©signer les habitants de certaines zones rurales et montagneuses de amĂ©rique profonde. Oui, quelque chose de pas si Ă©loignĂ© du âRedneck Manifestoâ de Jim Goad, Ă©ditĂ© en Espagne par Dirty Works. Si vous souhaitez approfondir le sujet, je vous recommande de jeter un Ćil au documentaire appliquĂ© « Hillbilly », rĂ©alisĂ© par Sally Rubin et Ashley York, qui traite de lâiconographie du phĂ©nomĂšne dans les mĂ©dias et la culture populaire. Le drame de Ron Howard sâinscrirait donc carrĂ©ment dans le genre americaine, qui commencerait par âSymphonie de la vieâ (« Notre ville », 1940) de Sam Wood, qui est considĂ©rĂ© comme son principal rĂ©fĂ©rent, ou antĂ©cĂ©dent, du gothique amĂ©ricain, avec lequel « Hillbilly » a Ă©galement sa concomitance dans ses Ă©lĂ©ments les plus sordides et austĂšres.
Non seulement Wood serait un cultivateur prolifique de americaine; aussi Howard Hawks et John Ford, ce dernier en particulier dans lâun de ses chefs-dâĆuvre indiscutables, âLa route du tabacâ, dâaprĂšs le roman dâErskine Caldwell. Et aussi, chacun Ă sa maniĂšre, Raoul Walsh, Henry Hathaway, Andre deToth, Andrew V. McLaglen, Delmer Daves et bien dâautres.
Dans les annĂ©es soixante et soixante-dix, le genre a commencĂ© Ă utiliser des textures plus crĂ©pusculaires ou abstraites (Mulligan, Pakula, Penn, Karlson, Eastwood) ou simplement plus brutales, Ă©nergiques et sauvages (Peckinpah, Aldrich, Nelson, Siegel). Mais le film dâHoward se prĂ©sente avant tout comme un retour aux origines qui, comme les grandes Ćuvres du maĂźtre Ford, arrive trĂšs bien Ă mĂȘler progressisme et traditionalisme, au-delĂ de toute imposture typique du moment actuel, Ă la recherche dâun sens plus moral que politique au racontĂ©.
Rampage (rural) Ă lâamĂ©ricaine
La critique miteuse que nous mĂ©ritons nâaime pas les artistes qui regardent le passĂ© Ă moins quâils nâaient lâintention de le diffamer, de le rĂ©parer ou de le dĂ©construire. Il a aussi un sĂ©rieux problĂšme avec valeurs traditionnelles et ils ont toujours Ă peine avalĂ© les drames de lâexaltation familiale, aussi dysfonctionnelle soit-elle. La famille est le dernier endroit oĂč se tourner, mais il est ouvert toute la nuit, a dĂ©clarĂ© Ambrose Bierce.
Cela explique une partie du vomi versĂ© sur le film dâHoward : Peter Travers lâa qualifiĂ© dâ« opportunitĂ© manquĂ©e » ; Peter Bradshaw nâa pas hĂ©sitĂ© Ă lâappeler « artificiel et conscient de soi »; Alonso Duralde lâa qualifiĂ©e, sans plus tarder, de « non-sens de petite ville » ; Richard Lawson lâa dĂ©fini comme « un calcul dĂ©goĂ»tant dĂ©guisĂ© en empathie ». Dans notre pays, il nâa pas eu plus de chance ; Elsa FernĂĄndez-Santos Il expose ainsi son mĂ©contentement : « une succession de coups au pinceau large qui vise Ă rĂ©concilier les deux AmĂ©riques ». Il y avait aussi des articles qui touchaient le divorce critique et public: sans aller plus loin, Begoña GĂłmez Urzaiz lâa qualifiĂ© de « film que tout le monde aime dĂ©tester ». Et de mĂȘme que quelques-uns, pas quelques-uns, ont honte dâaimer.
Suffisant. Laissons de nouveau la haine de cĂŽtĂ©. âHillbillyâ peut ĂȘtre un parc Ă thĂšme misĂšres de lâamĂ©rique qui parfume la douleur et la pauvretĂ© dâun parfum de glamour hollywoodien, mais qui lâattaque pour ces raisons ne comprend rien Ă la carriĂšre de Ron Howard et ne peut guĂšre ĂȘtre Ă©mu par un drame de John Ford. Ou est-ce que des Ćuvres incontestables telles que âLes Raisins de la colĂšreâ ou âQuâelle Ă©tait verte ma vallĂ©e !â nâont-ils pas fait leurs concessions au spectacle et aux goĂ»ts de leur public pour ne pas ĂȘtre⊠euh⊠les briques ennuyeuses quâils auraient pu devenir ?
« Hillbilly » rassemble tous les Ă©lĂ©ments de ce que nous appelions autrefois le grand cinĂ©ma amĂ©ricain : devenir majeur, conflit intergĂ©nĂ©rationnel, disgrĂące, rĂ©demption, douleur, gloire, dĂ©faite et triomphe ; Ă peu prĂšs, les lumiĂšres et les ombres de rĂȘve amĂ©ricain. Et bien sĂ»r, câest basĂ© sur rĂ©alitĂ©s: notamment dans le roman autobiographique de JD Vance, qui se joue Ă lâĂ©cran en convaincant Gabriel BassoĂ lâĂąge adulte, et Owen Asztalos, Ă lâadolescence. Le livre Ă©tait un best-seller, trĂšs acclamĂ© (uh-huh) par les secteurs conservateurs, principalement parce quâil parvenait Ă transmettre quelque chose dâaussi « infĂąme » que lâesprit de lutte et de dĂ©passement des circonstances dĂ©favorables : une famille de classe infĂ©rieure et une mĂšre accro au hĂ©roĂŻne Maintenant, il sâavĂšre que la mĂ©ritocratie est fasciste ; ou pire encore, trompette.
Il est clair que lâhistoire de Vance ne pourrait pas sâappliquer Ă tous les cas (sans parler du mien et peut-ĂȘtre du vĂŽtre), mais ce qui est clair, câest que le cinĂ©ma doit aussi continuer Ă jouer le rĂŽle dâusine Ă rĂȘves et Ă beaux mensonges, Ă la maniĂšre de Nicholas Ray et cette fin mĂ©morable de âJohnny Guitarâ. Pour affronter notre nĂ©ant quotidien nous avons dĂ©jĂ la rĂ©alitĂ© ; il nây a parfois rien de mieux quâun bon film hollywoodien artificiel qui nous rappelle que, malgrĂ© les obstacles en cours de route, la lutte porte parfois ses fruits au bout du long chemin.
Ce qui nâest pas trĂšs Ă©loignĂ© du message dâune grande partie des films rĂ©solument sociaux qui triomphent dans les festivals et remportent les applaudissements du public consciencieux et bienveillant, surtout lorsque le hĂ©ros appartient Ă une minoritĂ© ou est une femme, et est pas simplement un jeune homme blanc de classe infĂ©rieure (comme si la classe nâĂ©tait pas un facteur dĂ©terminant, le plus important de tous en vue de la rĂ©ussite et des privilĂšges). Encore une fois, le piĂšge de la diversitĂ©. LâabsurditĂ© fiĂ©vreuse de revendiquer son identitĂ© en des temps dĂ©finitivement dĂ©sorientĂ©s. Mireia Mullor a citĂ© lâĂ©valuation du roman par Bob Hutton : « illustre lâoxymore que revendiquent le capitalisme et ses dĂ©fenseurs : tout individu qui travaille dur peut atteindre le sommet, mais pour ce faire, de nombreux individus doivent rester en dessous« .
Les critiques prĂ©tendent-ils que lâadaptation du roman doit ĂȘtre infidĂšle aux faits, supposĂ©s rĂ©els, qui y sont relatĂ©s pour sâadapter Ă un message moins problĂ©matique et plus dans lâesprit de son temps ? Et, bien sĂ»r, accepter que le systĂšme capitaliste gĂ©nĂšre une division disproportionnĂ©e et injuste entre riches et pauvres⊠Hutton implique-t-il que les membres de la classe infĂ©rieure ne devraient pas prospĂ©rer tout au long de leur vie dĂ©jĂ assez compliquĂ©e, restant toujours dans une sorte dâimpression grise et nĂ©orĂ©aliste , pour ne pas se substituer aux puissants, car cela impliquerait lâacceptation dâun systĂšme rĂ©prĂ©hensible ? Et surtout, quand les femmes et les personnes dâautres races non caucasiennes rĂ©ussissent⊠ne sont-elles pas aussi, en mĂȘme temps,âŠ
SOURCE : Reviews News
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