Préparons

đŸŽ¶ 2022-03-20 13:59:00 – Paris/France.

« Another Spring » Ă©tait la chanson de Simone qui m’a touchĂ© cette semaine. Le journaliste artistique Michael Sumsion a fait part de ses rĂ©flexions sur la chanson en 2017, pour Vinyl Chapters.

S’ouvrant sur une rafale stridente d’accords de piano jazz Ă©claboussants, comme si elle tentait de se frayer un chemin dans la psychĂ© du personnage de la chanson comme un acteur mĂ©thodique, « Another Spring » commence par l’imagerie sombre et hivernale de la vieillesse solitaire : « Ouais et pendant un petit moment eh bien je m’en fous/Si mes jours arrivent Ă  leur fin/Et autant ĂȘtre bientĂŽt partis parfois”.

La chanson raconte le rĂ©cit d’une femme ĂągĂ©e sur sa situation actuelle et la vie qu’elle a eue autrefois; ses enfants ont dĂ©mĂ©nagĂ© loin et l’ont laissĂ©e seule dans sa maison, se parlant dans une chaise berçante pleurant l’homme qui est parti. Sa vie est aussi nue que les rues austĂšres et froides Ă  l’extĂ©rieur.

Pourtant, le printemps arrive Ă  sa porte un matin et avec le « Et puis
 » doucement chuchotĂ© par Nina, l’ambiance de la chanson passe de la solennitĂ© et de la colĂšre inconsolable Ă  la joie pellucide, puis enfin Ă  la sĂ©rĂ©nitĂ© et Ă  l’acceptation. L’arrivĂ©e d’un tambourin entraĂźne le passage vers le haut vers trois strophes Ă©difiantes de puissance et de majestĂ© suprĂȘmes, mĂȘlĂ©es aux cadences Ă©mouvantes du gospel – c’est un changement de genre comme seule Nina peut le faire.

Sumsion souligne que la chanson et l’album sur lequel elle se trouve, intitulĂ© Nina Simone et piano !, Ă©taient des flops commerciaux. Comme nous le savons tous, cependant, les ventes ne sont pas synonymes de mĂ©rite ou de qualitĂ©.

En tant que femme approchant de son 75e anniversaire, je pouvais m’identifier Ă  la puissante ouverture parlĂ©e, qui se fond parfaitement dans la chanson.

« Another Spring » (Paroles et musique d’Angelo Badalamenti et John Clifford)

Les vieux se parlent
Quand ils sont assis tout autour toute la journée
Cette vieille femme que je connaissais
J’avais l’habitude d’aller là-bas et de m’asseoir avec elle
Et elle serait assise
Dans une chaise berçante se parlant Ă  elle-mĂȘme
Et elle avait l’habitude de dire qu’elle avait l’habitude de dire
Parfois le froid me pénÚtre tellement les os
Jusqu’à ce que je ne pense plus pouvoir y aller
Ouais et pendant un petit moment je m’en fous
Si mes jours se terminent
Et tout aussi vite parti parfois

Parfois la nuit tombe sur moi
Et je sais ce qui m’attend
Une soirée dans cette vieille maison froide
Sans personne pour me dire bonne nuit quand je vais au lit
Une soirée dans cette vieille maison froide
Sans personne pour me dire bonne nuit quand je vais au lit

Parfois
Je me demande pourquoi je reste
Qu’est-ce que j’attends
Mes enfants sont grands et sont partis
Ils ont leurs propres enfants maintenant
N’ai plus besoin de moi

En hiver quand les rues sont nues
Il n’y a pas grand chose à voir
Je ne peux pas m’empĂȘcher de manquer et de penser
À propos de cet homme gentil
Ce vieil hiver est venu
Et m’a enlevĂ©

Et en tant que jardinier avec une mangeoire Ă  oiseaux dans la cour regardant les premiĂšres fleurs de perce-neige et les crocus sortir de sous le sol, la fin de la chanson m’a rappelĂ© la joie et la gratitude que je devrais toujours exprimer – pour ĂȘtre simplement en vie.

Et puis un matin
Un autre printemps est lĂ  devant ma porte
Les choses fleurissent
Les oiseaux chantent
Et du coup oui ben je ne suis pas triste
N’est plus triste n’est plus triste
Quand il fait chaud et que le soleil est au rendez-vous
C’est comme si mon coeur Ă©tait restaurĂ©
j’ai eu mon amour j’ai eu mes enfants
Et j’ai tellement de souvenirs
Alors ne m’en veux pas de me plaindre
Ce que les années peuvent apporter

Parce que ce vieux monde a été trÚs bien avec moi vraiment
Et je suis reconnaissant de voir un autre printemps
Ça ira mieux cette fois un autre printemps
Ça va ĂȘtre plus groovy cette fois un autre printemps
C’est ce qui se passe cette fois
Donc je suis reconnaissant de me laisser voir un autre printemps

Un chaleureux merci Ă  Mme Simone et aux auteurs-compositeurs pour ce cadeau musical.

En parlant de crocus, les sensations vertigineuses Ă©voquĂ©es par les fleurs et les pensĂ©es plus larges du printemps sont le sujet de « It Might As Well Be Spring », la chanson Rogers et Hammerstein primĂ©e aux Oscars en 1945 tirĂ©e du film. Foire d’État, qui a Ă©tĂ© repris des centaines de fois par des musiciens d’un large Ă©ventail de genres.

Je suis aussi occupĂ© qu’une araignĂ©e en train de rĂȘver,
Je suis aussi vertigineux qu’un bĂ©bĂ© sur une balançoire.
Je n’ai pas vu de crocus ni de bouton de rose
Ou un rouge-gorge en vol,

Mais je me sens si gai – d’une maniĂšre mĂ©lancolique –
Que ce pourrait aussi bien ĂȘtre le printemps

Ce pourrait aussi bien ĂȘtre le printemps.

Voici le point de vue de Simone :

En Ă©coutant Simone, j’ai Ă©tĂ© ramenĂ© Ă  une Ă©poque il y a quelques annĂ©es oĂč j’enseignais encore Ă  SUNY New Paltz, et aucun des Ă©lĂšves de l’une de mes classes n’avait jamais entendu parler d’elle ou de sa musique. Dans cet esprit, j’ai Ă©tĂ© heureux de voir les efforts actuels pour prĂ©server son hĂ©ritage et une place dans notre histoire, comme indiquĂ© cette semaine dans Le magazine de style du New York Times.

L’histoire s’ouvre en dĂ©crivant les efforts de l’artiste Rashid Johnson pour prĂ©server la maison de WEB Du Bois au Ghana, puis enchaĂźne en exerçant un effort similaire pour Simone ici Ă  la maison.

Il y a cinq ans, Johnson s’est associĂ© Ă  trois autres artistes noirs amĂ©ricains de premier plan – le conceptualiste Adam Pendleton, la peintre abstraite Julie Mehretu et la peintre, collagiste et cinĂ©aste Ellen Gallagher – pour aider Ă  mettre en lumiĂšre un autre ancĂȘtre imposant : l’interprĂšte musical dĂ©fiant les genres et militante des droits civiques Nina Simone. La maison d’enfance de Simone, situĂ©e Ă  Tryon, en Caroline du Nord, une petite ville de 1 600 habitants nichĂ©e au pied de l’escarpement sud des Blue Ridge Mountains, risquait de succomber Ă  l’ñge et Ă  la nĂ©gligence. Une fois sensibilisĂ©s, les artistes achĂštent la maison, pour 95 000 $, en 2017. L’annĂ©e suivante, le National Trust for Historic Preservation la dĂ©signe trĂ©sor national. [
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NINA SIMONE EST nĂ©e Eunice Kathleen Waymon le 21 fĂ©vrier 1933, dans la maison de 660 pieds carrĂ©s au 30 East Livingston Street. La mĂšre de Simone Ă©tait ministre ordonnĂ©e et employĂ©e de maison; son pĂšre dirigeait sa propre entreprise de nettoyage Ă  sec et travaillait comme homme Ă  tout faire. Aussi modeste que puisse paraĂźtre la maison aujourd’hui, elle incarnait Ă  l’époque la promesse de la prospĂ©ritĂ©. Le terrain des Waymon leur offrait de la place pour un potager. Ils ont Ă©galement profitĂ© d’autres petits luxes, comme le dĂ©crit la biographie de Nadine Cohodas en 2010, « Princesse Noire : le rĂšgne tumultueux de Nina Simone » : un poĂȘle dans deux des trois piĂšces pour garder la maison au chaud pendant les mois froids et pour chauffer l’eau pour baignade; un petit orgue Ă  pompe oĂč Eunice a choisi ses premiĂšres notes; une balançoire dans la cour; mĂȘme un court de tennis juste de l’autre cĂŽtĂ© de la rue. L’exercice de la sĂ©grĂ©gation Ă©tait plus nuancĂ© Ă  Tryon que dans les grandes agglomĂ©rations comme Charlotte et Atlanta, mais il s’exerçait nĂ©anmoins comme un manque palpable. Simone, ses parents et ses frĂšres et sƓurs (elle Ă©tait la sixiĂšme de huit enfants) ont vĂ©cu dans la maison jusqu’au dĂ©but de 1937, lorsque son pĂšre a souffert d’une maladie intestinale qui l’a rendu inapte pendant un certain temps. Les annĂ©es suivantes ont Ă©tĂ© itinĂ©rantes, la famille dĂ©mĂ©nageant dans prĂšs d’une demi-douzaine de maisons aujourd’hui oubliĂ©es Ă  Tryon et dans les environs.

Ces premiĂšres annĂ©es sur Livingston Street ont Ă©tabli la fondation de Simone en tant qu’artiste. « Tout ce qui m’est arrivĂ© quand j’étais enfant impliquait la musique », a Ă©crit Simone dans son autobiographie de 1992, « I Put a Spell on You ». « Cela faisait partie de la vie quotidienne, aussi automatique que la respiration. » Sa mĂšre, Mary Kate, a chantĂ© des chansons d’église Ă  sa fille; son pĂšre, John, l’a initiĂ©e au jazz et au blues. Au moment oĂč Eunice avait 4 ans, elle accompagnait sa mĂšre au piano alors qu’elle prĂȘchait les sermons du dimanche Ă  l’église St. Luke CME.

Je terminerai cet hommage aux explorations printaniĂšres de Simone avec cette coupe d’un album avec lequel elle n’a rien Ă  voir
Nina Simone avec des cordes—sorti sur le label Colpix en 1966 aprĂšs qu’elle l’ait quittĂ© (et rĂ©Ă©ditĂ© par Cornbread Records en 2019). Bien que toutes les chansons collectĂ©es ne comportent pas de cordes, c’était un gadget populaire Ă  l’époque : de nombreux grands musiciens ont Ă©tĂ© commercialisĂ©s « avec des cordes » ; Simone ne ferait pas exception.

Ici, elle chante « Spring is Here », une chanson populaire composĂ©e en 1928 par Richard Rodgers, avec des paroles de Lorenz Hart, pour la comĂ©die musicale J’ai Ă©pousĂ© un ange.

Bien que j’aie soulignĂ© Nina Simone aujourd’hui, j’ai une trĂšs longue liste de chansons pour le printemps d’artistes noirs Ă  partager, et je suis sĂ»r que les lecteurs en ont encore plus. Alors maintenant que « le printemps est arrivé », retrouvez-moi dans les commentaires pour d’autres sons de la saison.

SOURCE : Reviews News

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