« Peur de l’aube » de Jack White : critique

đŸŽ¶ 2022-04-07 16:44:51 – Paris/France.

« Lorsque vous coupez dans le prĂ©sent, le futur s’échappe », dĂ©clare un extrait Ă  la voix rocailleuse du regrettĂ© romancier Beat William S. Burroughs vers le milieu de la chanson avant-rock de Jack White « Into the Twilight ». Dans les annĂ©es cinquante, la DĂ©jeuner nu L’auteur a popularisĂ© un style d’écriture radical qu’il a surnommĂ© « la technique du dĂ©coupage », qui impliquait de taper ses pensĂ©es, de vivisecter la feuille de papier, puis de rĂ©organiser la composition en quelque chose de nouveau, en espĂ©rant que les mots aient un nouveau sens dans un nouvel ordre. Cet esprit semble ĂȘtre ce que l’amateur d’art moderne Jack White (rappelez-vous De Stijl?) poursuivait Peur de l’aubel’album solo parfois euphorique, parfois bizarre qu’il a rĂ©alisĂ© pendant les annĂ©es de quarantaine.

« Into the Twilight » commence par un scatting vocal jazzy « ba-da-da » (gracieusetĂ© d’un Ă©chantillon de Manhattan Transfer), puis interpole une batterie trip-houblonnĂ©e, des Ă©chantillons de voix accĂ©lĂ©rĂ©s jusqu’à des hauteurs d’hĂ©lium qui sonnent comme des bonbons pour les oreilles du dĂ©but des annĂ©es 90. Prince albums et bombes en piquĂ© de guitare buzzsaw. Mais, comme l’écriture de Burroughs, cela a toujours un sens. White joue toujours des riffs de blues percutants, et sa voix de tĂȘte sonne toujours comme Robert Plant hurlant Ă  Valhalla mĂȘme si les paroles ne disent pas grand-chose (« Ici dans la nuit, tout va bien » est Ă  peu prĂšs aussi rĂ©vĂ©lateur que possible.) C’est essentiellement un collage rock-soul-jazz-poĂ©sie, et si vous deviez le distiller jusqu’à ses Ă©lĂ©ments individuels, chaque partie peut sembler agrĂ©able – mais comme une chanson de prĂšs de cinq minutes, c’est toujours un train de marchandises de confusion. C’est parce que le problĂšme avec l’art expĂ©rimental est que parfois les expĂ©riences Ă©chouent.

Malheureusement, Peur de l’aube – le premier des deux disques que White sortira cette annĂ©e – ressemble Ă  un mĂ©li-mĂ©lo de bonnes intentions et d’exĂ©cution moyenne. Les meilleures chansons ici sont celles oĂč White Ă©coute ses instincts et ne laisse pas ses concepts gĂȘner un bon crochet. « That Was Then (This Is Now) » fusionne les explosions blues maniaques de White Stripes avec ses ambitieuses tangentes jazz sans perdre l’intrigue ; «Taking Me Back», un rockeur droitier que White a entiĂšrement enregistrĂ©, sonne concentrĂ© et hummable mĂȘme si le son de la guitare est un peu trop cuit; et « Eosophobia (Reprise) » prĂ©sente certains des wah-wah de guitare les plus inspirĂ©s de White Ă  ce jour, mais souffre toujours de paroles comme « La nuit, il n’y a pas de lumiĂšre, je ne me trompe pas » (qui se lit comme si elles avaient Ă©tĂ© Ă©crites Ă  la planchette) .

Mais tout se dĂ©fait lorsqu’il permet Ă  ses ambitions de devenir mĂ©taphysiques. Il voulait mettre Ă  jour le joyeux scatting de Cab Calloway sur « Hi-De-Ho » avec une mĂ©lodie de danse moderne sur la pointe des pieds et quelques couplets hip-hop hi-de-ho’ing par Q-Tip de A Tribe Called Quest, mais ça a fini par ressemblant plus Ă  de la pop revival Big Band de la fin des annĂ©es 90. Et l’initiale « Eosophobia » (un ancien grec apparentĂ© signifiant « peur de l’aube ») est un hybride Ă  la Dr. Moreau de dub reggae et de riffs de Jimmy Page qui ne se traduit pas tout Ă  fait par « Dyer Maker ». White a construit « What’s the Trick? » en utilisant des Ă©chantillons de riffs de guitare propulsifs, mais cela semble contre nature et un peu rebutant en raison de son penchant pour le style Captain Beefheart et les Ă©chantillons de batterie dance-y.

Les collages de chansons pop sont parfois discordants et rappellent parfois la fin des annĂ©es 90 lorsque tous les groupes de rock tentaient d’écrire des chansons avec des rythmes trip-hop (certains pour le meilleur, comme les deux premiers albums de Garbage, d’autres pour le pire, comme « Desert Rose » de Sting. ”) White n’a qu’à espĂ©rer que les auditeurs auront la mĂȘme capacitĂ© d’attention (et la mĂȘme patience) que lui. Et s’ils ne le font pas, il sort un autre nouvel album, Entrer vivant au paradis, deux mois plus tard, c’est peut-ĂȘtre plus traditionnel ; le seul morceau qu’il a sorti jusqu’à prĂ©sent, « Love Is Selfish », est un joli morceau acoustique au son standard suggĂ©rant que le reste de l’album pourrait servir de chasseur pour les expĂ©riences approximatives sur Peur de l’aube. Le problĂšme avec le fait de couper dans le prĂ©sent et d’attendre l’avenir, c’est que l’avenir n’est pas toujours ce que vous avez espĂ©rĂ©.

SOURCE : Reviews News

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