đ 2022-11-06 07:03:00 â Paris/France.
La grande exaltation littĂ©raire de La PremiĂšre Guerre mondiale a Ă©tĂ© publiĂ© en 1920. Câest Les TempĂȘtes dâacier, de Ernest Junger, un roman ancrĂ© dans lâautobiographie qui naĂźt des journaux quâil a Ă©crits entre 1914 et 1918, pĂ©riode pendant laquelle il a Ă©tĂ© au front, a Ă©tĂ© blessĂ© sept fois et sâest bien amusĂ©. Ătonnante? Peut-ĂȘtre pas tellement. JĂŒnger Ă©tait un excentrique et un talent extraordinaire.
Au cours de ses plus dâun siĂšcle de vie, il a chantĂ© les vertus de la guerre dâune maniĂšre que Hitler trouvait charmante, il a frĂ©quentĂ© des nazis purs et durs comme Heidegger et a reprĂ©sentĂ© le nazisme dans la France occupĂ©e, mais il a refusĂ© dâĂȘtre membre du parti A national socialiste, il Ă©vite probablement lâantisĂ©mitisme, flirte un peu avec les SoviĂ©tiques, et finit par consacrer ses journĂ©es aux insectes, quâil collectionne de maniĂšre obsessionnelle, et dĂ©fend lâusage libre et joyeux de la drogue. Pourtant, son culte de la guerre, trĂšs fasciste, Ă©tait loin dâĂȘtre rare dans cette Allemagne pĂ©trie de romantisme proto-nazi.
Câest lĂ que rĂ©side lâoriginalitĂ© et le succĂšs dâAll Quiet on the Front, le roman trĂšs lu du pĂšre fondateur de lâantiguerre de lâentre-deux-guerres, Ă©galement Allemand. Erich Maria Remarque, publiĂ© en 1929, transformĂ© en succĂšs planĂ©taire et adaptĂ© au cinĂ©ma Ă deux reprises, dĂšs 1930 et en 1979, avant le film que lâon peut voir sur Netflix pendant quelques jours, rĂ©alisĂ© par lâAllemand Edward Berger. La passion de JĂŒnger pour la guerre en tant quâexpĂ©rience limite, pure et ultra-masculine, comprenant insupportablement le masculin comme positif, se manifeste dans des lignes comme celle-ci :
« Elle, la guerre, câest elle qui devait nous apporter ça, les choses grandes, fortes, splendides. La guerre nous apparaissait comme un lancement viril, un joyeux concours de tir organisĂ© sur des prairies fleuries oĂč le sang Ă©tait la rosĂ©e. ImprĂ©gnĂ© de nationalisme allemand et dâun Ă©lan militaire similaire, Remarque, en revanche, a rapidement trouvĂ© le dĂ©senchantement. All Quiet on the Front est une Ă©pouvantable chevauchĂ©e qui commence par une idiotie militaire â « Saluez, mettez-vous au garde-Ă -vous, paradez, prĂ©sentez les armes⊠Endurez des insultes et des tas dâhumiliations⊠; ils nous ont prĂ©parĂ©s Ă lâhĂ©roĂŻsme comme si nous Ă©tions des chevaux de cirque » â et culmine dans un massacre inutile, grotesque, cruel, avec des cervelles qui reviennent partout et des bottes noyĂ©es dans la boue. Câest prĂ©cisĂ©ment pourquoi il est si difficile de lâamener au cinĂ©ma, qui est gĂ©nĂ©ralement Ă lâaise dans le triomphalisme guerrier.
Avec un talent brutal, de par son ampleur et sa nature, Berger rĂ©alise une adaptation vertueuse et parfois presque impossible Ă voir, du fait de la cruautĂ© des sĂ©quences, de lâinutilitĂ© du carnage si vif, de la dĂ©solation et de la destruction de tout ce qui est bon et heureux quâil puisse atteindre les tranchĂ©es. Film, oui, particuliĂšrement opportun Ă lâĂ©poque de la militarisation du pays et du poutinisme mondial.
PAR JULIO PATĂN
JOURNALISTE
@juliopatan09
MAAZ
SOURCE : Reviews News
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