đ” 2022-03-22 14:00:00 â Paris/France.
HonnĂȘtement, beaucoup de films de Paul Thomas Anderson â y compris sa comĂ©die nominĂ©e aux Oscars Pizza RĂ©glisse â se sentir comme des vidĂ©os musicales prolongĂ©es. Parfois, ce sont essentiellement : Magnolia, sorti en 1999, Ă©tait la tentative dâAnderson dâadapter la musique de son ami Aimee Mann dans un film. (Les rĂ©sultats suggĂšrent que câĂ©tait une bonne idĂ©e.)
Pizza RĂ©glisseLes gouttes dâaiguille de , tissĂ©es dans le paysage Ă©motionnel enivrant dâun Ă©tĂ© des annĂ©es 1970 dans la vallĂ©e, ressemblent Ă de petits coups de cĆur agrĂ©ables, Ă chaque fois. En composant lâĂ©trange bande-son de Tinkly pour Amour bourrĂ© de punch (2002), Jon Brion a mĂ©langĂ© la musique originale avec une chanson du film des annĂ©es 1980 de Robert Altman Popeye, pour un effet dĂ©licieux. Et, bien sĂ»r, SoirĂ©es boogie (1997) joue comme une longue fĂȘte, tellement chargĂ©e de bangers quâils ont dĂ» sortir la bande originale en deux volumes.
Cela explique peut-ĂȘtre pourquoi les vidĂ©oclips dâAnderson, Ă leur tour, ressemblent Ă des films. Dans certains cas, il sâagit en fait de courts mĂ©trages : il y a Valentin (2017), un documentaire Ă la volĂ©e en studio avec le groupe pop-rock basĂ© Ă Los Angeles Haim, et Anima (2019), une collaboration avec Thom Yorke de Radiohead, qui joue comme une science-fiction dystopique avec un cĂŽtĂ© plein dâespoir. Mais mĂȘme les longs mĂ©trages les plus traditionnels â dont il rĂ©alise des dizaines depuis les annĂ©es 90 avec des artistes tels que (ex-petite amie) Fiona Apple, Joanna Newsom, Radiohead, Haim, Aimee Mann et Michael Penn â ressemblent Ă des mini-films portant ses empreintes digitales indubitables.
Quelles sont ces empreintes digitales ? Les films dâAnderson sont toujours un peu flous, un peu dĂ©calĂ©s, avec des personnages principaux qui semblent souvent un peu dĂ©placĂ©s dans leur monde â un match parfait pour les musiciens.
Dans Le maĂźtre (2012), le solitaire Freddie Quell (Joaquin Phoenix) est dĂ©chiquetĂ© et imprĂ©visible, un homme qui semble sur le point dâexploser ou de se ratatiner Ă tout moment inattendu. Deux ans plus tard en Vice inhĂ©rent, Phoenix est maintenant un dĂ©tective tendu qui a un jour de retard et un dollar Ă court alors que la vie sâemballe devant lui. SoirĂ©es boogieâ Dirk Diggler (Mark Wahlberg) nâest en rĂ©alitĂ© quâun enfant Ă la recherche dâune famille Ă laquelle appartenir; il le trouve dans un groupe glamour mais hĂ©tĂ©roclite dâacteurs porno. Daniel Plainview (Daniel Day-Lewis), le prospecteur au centre de Il y aura du sang (2007), est un homme hors du temps, Ă la fois moderne et en quelque sorte mĂ©diĂ©val dans son regard.
La liste pourrait sâallonger, alors câest super amusant de les voir aussi apparaĂźtre dans ses vidĂ©oclips. Prenez celui-ci, mon prĂ©fĂ©rĂ©, pour la couverture de « Across the Universe » de Fiona Apple en 1998 :
Apple est assis en train de chanter placidement et sincĂšrement au milieu dâun restaurant en Ă©tant absolument saccagĂ© par une horde dâhommes en costume. Le rĂ©sultat est un paysage de rĂȘve flou, et nous nous demandons ce que fait exactement cette gentille jeune femme au milieu dâun chaos absolu. Elle est dans un autre monde. (Et rien ne changera ça.)
MĂȘme ambiance dans cette vidĂ©o dâAimee Mann, pour « Save Me »:
Mann est assis au milieu de scĂšnes de Magnolia, dĂ©crivant apparemment le plaidoyer Ă©motionnel de la distribution solitaire de personnages â « Pourquoi ne me sauvez-vous pas? » â mais aussi la sienne, comme lâune de celles qui sont dans les « rangs des monstres / qui soupçonnent / quâils ne pourraient jamais aimer personne ». AprĂšs tout, câest un fantĂŽme ici. Ils ne savent mĂȘme pas quâelle est lĂ .
Ou cette vidĂ©o pour la chanson « Divers » de Joanna Newsom, dans laquelle elle plane sur le paysage comme une dĂ©esse ou un gĂ©ant, seule au milieu dâune nature harmonieuse, une prĂ©sence Ă©trange et inquiĂ©tante chantant un amour perdu :
« Vous ne connaissez pas mon nom », conclut-elle. « Mais je connais le vÎtre. »
Parfois, Anderson rend le manque de cohĂ©rence de ses personnages, leur Ă©trange aliĂ©nation, en les suivant alors quâils traversent avec force des scĂšnes de chaos absolu. Les longs travellings sont une autre de ses caractĂ©ristiques cinĂ©matographiques; ils sont tous finis Pizza RĂ©glissebien sĂ»r, mais peut-ĂȘtre le plus cĂ©lĂšbre est le plan ininterrompu de trois minutes qui ouvre SoirĂ©es boogie:
Il ne fait que frimer avec ça, mais il adore le faire. Ici, il suit Joanna Newsom â cette fois sans steadicam â dans les rues trĂ©pidantes de Greenwich Village alors quâelle chante « Sapokanikan »:
Ou, dans ce clip vidĂ©o trĂšs cĂ©lĂšbre, il recule dâun seul coup de SoirĂ©es boogie le compositeur Michael Penn, qui chante « Try » tout en alimentant le plus long couloir dâAmĂ©rique (Ă un quart de mile). RepĂ©rez les camĂ©es de Philip Seymour Hoffman :
Ces derniĂšres annĂ©es, Anderson a frĂ©quemment fait Ă©quipe avec Haim, et dans ces vidĂ©os, vous pouvez revoir toutes ses empreintes digitales. les vidĂ©os sont dĂ©sordonnĂ©es et belles, et la camĂ©ra est autant un personnage que les musiciens. La plus amusante dâentre elles pourrait ĂȘtre la vidĂ©o de leur single « Summer Girl » de 2019, dans laquelle les sĆurs se promĂšnent dans Los Angeles en enlevant lentement des couches de pulls molletonnĂ©s et de chemises alors quâelles entrent dans la saison la plus chaude :
Le groupe a commencĂ© Ă tourner la vidĂ©o « Summer Girl » avec Anderson essentiellement avant que la chanson ne soit terminĂ©e, et il a fini par y contribuer quelques lignes de film inutilisĂ©es (puis a refusĂ© un crĂ©dit dâĂ©criture).
Plus rĂ©cemment, sa vidĂ©o pour « Lost Track » (sorti le 1er mars) prĂ©sente Danielle Haim ressemblant Ă une adolescente mĂ©contente misĂ©rable lors dâune terrible fĂȘte oĂč elle est lâintruse. « Jâessaie de me sentir bien / avec tous ces gens / jâessaie mais je suis juste engourdie / cette fois », chante-t-elle devant la camĂ©ra alors quâun groupe de femmes en robes rĂ©tro bourdonne autour dâelle en sâamusant:
La collaboration de Haim avec Anderson est si profonde que le plus jeune Haim, Alana, est la star de Pizza RĂ©glisse, dans une performance exceptionnelle qui a Ă©tĂ© acclamĂ©e par tous. Elle joue une autre jeune femme qui ne se sent pas Ă sa place partout, du monde des adultes quâelle hĂ©site Ă rejoindre sa propre famille (jouĂ©e, dĂ©licieusement, par ses propres sĆurs et parents rĂ©els). Dans le film, on sent la confiance entre lâartiste et le rĂ©alisateur, le genre de chose qui sâacquiert au fil des annĂ©es de collaboration.
Câest ce qui a toujours rendu les films dâAnderson si extrĂȘmement satisfaisants Ă regarder. Câest un rĂ©alisateur qui aime pousser les bleus des gens et les pousser sur le cĂŽtĂ©, mais jamais de maniĂšre douloureuse. On a lâimpression quâil aime ses personnages.
Ce nâest pas diffĂ©rent dans ses vidĂ©oclips : quâil zoome lentement sur Thom Yorke et Jonny Greenwood jouant de la guitare dans un parc crĂ©pusculaire, quâil transforme Fiona Apple en une dĂ©esse contrapuntique dâavant-garde ou quâil regarde Danielle Haim passer par un lave-auto, vous pouvez ressentez la fascination pour les visages et le tiraillement entre la joie et le sentiment que la vie est vraiment bizarre. Regardez-les tous dans lâordre, et vous pourriez commencer Ă vous demander sâil est dâabord rĂ©alisateur de vidĂ©oclips, aprĂšs tout.
Les vidéoclips de Paul Thomas Anderson sont disponibles sur regarder sur YouTube. Pour plus de recommandations du monde de la culture, consultez le Une bonne chose les archives.
SOURCE : Reviews News
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