🎶 2022-04-14 11:00:09 – Paris/France.
Et pourtant, la vision dominante de la musique ambiante aujourd’hui est une inversion caricaturale de ces aspirations. Dans une industrie du bien-être de plusieurs milliards de dollars, les plateformes de Streaming et les applications de méditation encadrent l’ambiance comme musique de fond – quelque chose pour une écoute et une consommation détachées. C’est de la musique de spa et de yoga, ou des enregistrements sur le terrain pour un sommeil paisible et réparateur. Au lieu d’embrasser le potentiel de l’ambient – sa capacité à adoucir les barrières et à assouplir les idées de son, de politique, de temporalité et d’espace – la musique est devenue instrumentalisée, réduite à un son comme toile de fond.
C’est une drôle de chose de penser à la musique ambiante en tant qu’utilité, comme si c’était quelque chose qui permettait un engagement sélectif. Comme l’a écrit le musicien Lawrence English, « Ignorer la musique, ce n’est pas l’écouter ». Au contraire, faire l’expérience de la musique ambiante – pour permettre à ses connaissances politiques, philosophiques et oppositionnelles de devenir visibles – nécessite une pleine utilisation des sens. Cela signifie puiser dans la vitalité sensorielle de la vie : les expériences tactiles, spatiales, vibratoires et auditives que nous offre l’être humain.
La pionnière de la musique expérimentale Pauline Oliveros a prévu comment une approche sensorielle de la musique et de l’écoute pourrait cultiver une pensée politiquement dynamique. Elle a passé sa vie à développer une théorie de l’écoute profonde, une pratique qui promeut une attention radicale. Dans cette approche, il y a une distinction entre entendre et écouter; le premier est une prise de conscience superficielle de l’espace et de la temporalité, et le second est un acte de concentration immersive. « L’écoute profonde nous emmène sous la surface de notre conscience et aide à changer ou à dissoudre les frontières limitantes », a-t-elle écrit en 1999. « L’écoute, c’est diriger l’attention sur ce qui est entendu, recueillir le sens, interpréter et décider de l’action. »
En 1974, en réponse au tumulte de la guerre du Vietnam, Oliveros publie une série de partitions textuelles intitulées « Sonic Meditations », un précurseur de sa théorie de l’écoute profonde. Le projet explore comment les exercices sonores centrés sur le corps peuvent favoriser une perception ciblée. Oliveros a développé des «méditations sonores» à partir de rassemblements de femmes qu’elle organisait chez elle. Lors de ces réunions, le groupe, qui a émergé dans le contexte du mouvement de libération des femmes, faisait de la respiration, écrivait dans des journaux et pratiquait des exercices de conscience cinétique chaque semaine. L’expérience a été conçue pour être collective, utilisant l’intimité et l’introspection pour nourrir un sentiment de guérison.
J’ai pratiqué l’écoute profonde avec ma playlist « si vous avez besoin de respirer », en particulier avec la composition de l’innovateur new-age Laraaji « Being Here ». Il est difficile de déterminer exactement quand « Being Here » clique : c’est peut-être à la marque des 10 minutes, ou la marque des 15 minutes ou même à sa fin béatifique de 25 minutes. Laraaji, qui publie de la musique depuis la fin des années 1970, produit une glossolalie auditive – des débris mélodiques divins et luminescents. En écoutant sa musique, je suis tenu dans une étreinte tacite avec sa vision du présent, des notes se réfractant comme la lumière du soleil caressant les eaux azur de l’océan. C’est une musique qui s’enroule dans les oreilles, se muant en un Elysée imaginaire, arrêtant le temps et l’espace. Ce n’est pas seulement un décor, pas un simple baume pour une douleur incommensurable.
SOURCE : Reviews News
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