đ 2022-10-03 19:07:20 â Paris/France.
LâAmĂ©ricaine Joyce Carol Oates (Lockport, 1938), lâauteur de âBlondeâ, le roman, fait partie de ces Ă©crivains dont le nom tourne depuis des dĂ©cennies dans le battage mĂ©diatique du prix Nobel. Sâil ne lâa pas obtenu jusquâici, ce nâest pas parce quâil nâa pas produit une Ćuvre Ă©norme -ses adversaires qui en ont et ils sont nombreux, diront quâelles sont excessivement Ă©normes, quâil lui faut au moins trois Ă©diteurs pour sort son rĂ©cit, sa poĂ©sie et ses ouvrages plus expĂ©rimentaux, Ă raison de quelque deux ou trois publications par an, « trop » â et dâune exigence littĂ©raire. Le livre qui est Ă lâorigine de lLe film dâAndrew Dominic qui fait tant de bruit, a Ă©tĂ© publiĂ© aux Ătats-Unis en 2000, avec des critiques mitigĂ©es.
Dâune part, elle Ă©tait lâune des favorites du Pulitzer, elle a remportĂ© le Prix âânational du livre et il a Ă©tĂ© accueilli comme un Ă©chantillon de plus du grand roman amĂ©ricain -une entĂ©lĂ©chie qui jusquâĂ prĂ©sent nâĂ©tait rĂ©servĂ©e quâĂ eux, les romanciers masculins-. En revanche, il a reçu, entre autres, un coup terrible de la âmĂšre de tous les critiquesâ, la toute puissante Michiko Kakutani du âThe New York Timesâ -ne vous fiez pas au nom japonais, elle est amĂ©ricaine- qui a rejetĂ© le roman en quelques termes trĂšs similaires Ă ceux utilisĂ©s maintenant pour le film et avec des accusations dâavoir le « but mercenaire de verser du sensationnalisme dans lâhistoire & rdquor; de Marilyne.
Entre la fille et le mythe
Lorsque Oates a publiĂ© son roman, il poursuivait dĂ©jĂ depuis un certain temps le fantĂŽme de Marilyn. ConcrĂštement, elle lui Ă©tait apparue en 2015 Ă travers une photographie oĂč la jeune Norma Jeane, une lycĂ©enne qui venait de remporter un concours de beautĂ©, rĂȘvant dâun avenir, est loin dâimaginer ce quâelle deviendrait. Dans cet Ă©cart, la fille quâelle Ă©tait et le mythe dâutiliser, de jeter et de dĂ©truire quâelle a fini par devenir, ont construit ce terrible roman.
Dans une interview au magazine âTimeâ, Oates a expliquĂ© quâil voulait faire avec âBlondeâ quelque chose de similaire Ă ce que Melville a fait avec âMoby Dickâ. Les deux sont des Ă©popĂ©es, avec une victime ritualisĂ©e Ă lâintĂ©rieur. La baleine est victime de la nature, lâautre est victime des fantasmes masculins du 20e siĂšcle, sacralisĂ©s par le systĂšme hollywoodien. Dans le roman, il est parfaitement clair que Oates a Ă©crit une Ćuvre de fiction, un conte de fĂ©es gothique qui finit malet ça le prĂ©cise clairement dans le prologue parce que mĂȘme alors, il y a 20 ans quand on ne lisait pas aussi littĂ©ralement quâaujourdâhui, je savais que ça nâallait pas ĂȘtre bien interprĂ©tĂ©.
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Un autre gros dĂ©faut dâOates pour ses dĂ©tracteurs est son façon directe et douloureuse dâutiliser la violencepeut-ĂȘtre parce que câest une femme ? LâAmĂ©ricaine a Ă son actif des pages de lecture parmi les plus insupportables sur le sujet et ses consĂ©quences. La question du viol marque obsessionnellement leurs histoires. Pour Oates â une femme dĂ©licate au visage de bonne sorciĂšre â le viol est le pĂ©chĂ© originel des relations entre hommes et femmes. Son idĂ©e est que Si nous sommes les victimes, pourquoi ne serions-nous pas les propriĂ©taires de lâhistoire ? Il a Ă©tĂ© accusĂ© de « gore », abaissant ses intentions Ă une simple spectaculaire, et il a Ă©tĂ© mal interprĂ©tĂ©. Il y a 20 ans, alors que le « Me Too » Ă©tait encore loin, elle rĂ©vĂ©lait prophĂ©tiquement lâutilisation obscĂšne du corps des actrices par des producteurs indĂ©sirables.
Faut-il ajouter quâil sâagit dâun femme trĂšs courageuse, qui a construit son travail sans relĂąche et qui, bien quâelle nâait pas participĂ© au scĂ©nario du film de Dominik, a Ă©tĂ© la premiĂšre Ă sauter sur le devant de la scĂšne sur Twitter -Oates non seulement Ă©crit des livres sans relĂąche, elle tweete aussi comme une mitraillette- pour dĂ©fendre Ă celle-ci ? : « Lâexploitation cruelle de Marilyn par, entre autres, John F. Kennedy, est bien connue de ses biographes, mais le traitement Ă lâĂ©cran est difficile Ă regarder pour certains tĂ©lĂ©spectateurs, alors ils suggĂšrent que vous ne le voyez pas & rdquor;, Ă©crivit-il ironiquement. Il nây a quâune seule façon dâavoir un bon jugement : lire et voir.
SOURCE : Reviews News
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