đż 2022-10-30 12:15:00 â Paris/France.
Luis Gerardo Méndez et Paulina Gaitån dans une scÚne de la série « Belascoarån ». Camila Jurado (Netflix)
Il sâagit de la version Web dâAmericanas, le bulletin EL PAĂS AmĂ©rica qui traite des nouvelles et des idĂ©es avec une perspective de genre. Si vous souhaitez vous abonner, vous pouvez le faire sur ce lien.
« Optimistes eux, qui croient que cette merde est pour toujours. » Olga Lavanderos regarde depuis sa moto la lĂ©gende peinte sur un mur, dans la plus grande ville du monde : le District FĂ©dĂ©ral. Et elle se sent soulagĂ©e. Merci. Peu importe quâelle ait passĂ© les derniĂšres heures Ă essayer de trouver les indices qui lui permettront dâĂ©crire une histoire qui lui Ă©vitera de couper les billets au journal pour lequel elle travaille. Et avec le discours dâune mĂšre et quelques jurons dans lâair, il continue son chemin Ă travers la capitale mexicaine. Ce sont les derniĂšres annĂ©es des annĂ©es 80, quand cette ville nâĂ©tait que lâombre du monstrueux labyrinthe de violence quâelle deviendra plus tard.
Et que seraient les grandes villes et les grandes histoires sans ceux qui rament Ă contre-courant, comme Olga ? Oser contredire ce qui est imposĂ©, la mode, le canon. En 1989, Paco Ignacio Taibo II rĂ©cidive. Et il a Ă©crit un roman mettant en vedette une jeune femme enhardie et chilanga de 23 ans, journaliste pour note rouge dans le district fĂ©dĂ©ral des annĂ©es quatre-vingt. Le livre comptait un peu moins dâune centaine de pages et sâintitulait : « Sentir que le champ de bataille⊠». Dans le prologue, Taibo prĂ©venait dĂ©jĂ quâil sâagissait « dâun roman Ă contre-courant ». Et lĂ -dedans, il se souvient aussi quand on lui a dit quâil ne pourrait jamais Ă©crire comme sâil Ă©tait une femme, et en plus, crĂ©er un personnage suffisamment crĂ©dible dans un contexte comme le Defeño, oĂč les femmes ne figuraient pas. ni nâont Ă©tĂ© trop pris en compte. . Son Olga serait diffĂ©rente. Taibo a alors Ă©crit, en guise dâavertissement : « Eh bien, pas seulement une femme, me suis-je dit. Une femme qui sâest avĂ©rĂ©e ĂȘtre toute une provocation. Et puis, comme jâallais avoir quarante ans, je serais jeune. Ils le verront. »
« Paco Ignacio Taibo II rend hommage au journalisme, âla derniĂšre putain de barriĂšre qui nous empĂȘche de tomber dans la barbarieâ, Ă travers le journaliste le plus attachant du rĂ©cit policier mexicain », comme on peut le lire Ă propos du livre sur la page de lâencyclopĂ©die de la littĂ©rature au Mexique, de la Fondation des lettres mexicaines. Mais Taibo II a fait, peut-ĂȘtre involontairement, quelque chose qui va bien au-delĂ .
Ceux qui ont lu lâhistoire dâOlga Lavanderos ont Ă©tĂ© enthousiasmĂ©s par ce quâelle avait Ă dire. La difficultĂ© de se faufiler dans les bureaux de la police de la ville, ou de faire face Ă la complicitĂ© des autoritĂ©s dans les crimes quâelles auraient eux-mĂȘmes enquĂȘtĂ©s. Les fonctionnaires grossiers et sexistes qui lâont invitĂ©e Ă boire un verre ou Ă manger un gĂąteau (ou quâelle a essayĂ© de persuader avec les mĂȘmes incitations Ă sâinformer) et lâenvironnement masculin dont elle est pourtant bien sortie.
Il ne sâagissait pas seulement dâatteindre les auteurs intellectuels et matĂ©riels dâun homicide multiple Ă Colonia Roma, mais aussi de dĂ©mĂȘler la corruption, les Ă©gouts, la pourriture et lâindiffĂ©rence dâune sociĂ©tĂ© mexicaine qui depuis les annĂ©es soixante-dix et quatre-vingt a commencĂ© Ă sâhabituer Ă la violence et Ă la tragĂ©die quotidiennes.
Et, en plus, essayer dâĂ©crire et de dĂ©crire cette rĂ©alitĂ© Ă partir de la plume et de lâencre dâune jeune femme, avec trĂšs peu dâargent dans les poches de son jean, et avec un syndrome dâimposteur en plus quâelle a parfois rĂ©ussi Ă attĂ©nuer, motivĂ© par les petites victoires quâil a remportĂ©es grĂące Ă sa ruse et Ă ses Ă©normes efforts.
Câest pourquoi un personnage comme le sien manque, dans les grandes productions nostalgiques qui tentent de recrĂ©er le Mexique dâavant, mais cela pourrait aussi ĂȘtre lâinvitation au possible : quâaurait Ă©tĂ© le Mexique dâavant, si une journaliste comme elle Ă©tait lâĂ©toile que nous voyons maintenant Ă travers lâĂ©cran ?
Si, comme Rodrigo Santos, le rĂ©alisateur de la sĂ©rie Netflix, basĂ©e sur le personnage le plus cĂ©lĂšbre de Taibo II : BelascoarĂĄn (crĂ©Ă© au Mexique le 12 octobre), quelquâun dans une autre partie de cet immense pays avait vu ou lu ses 17 ans les histoires dâun journaliste furieux, intelligent, rusĂ©, qui faisait un reportage Ă moto dans une sorte de ville gothique en manque dâoestrogĂšne et de progestĂ©rone. Je me demande si cette personne se serait sentie si passionnĂ©ment inspirĂ©e, puis aurait mis tous ses efforts, son Ă©nergie, ses ressources et sa passion pour le mettre Ă la tĂ©lĂ©vision, sur les Ă©crans, et pour que plus comme elle sache que oui, il est possible de survivre Ciudad de Mexico, mĂȘme lorsquâelle sâappelait le District fĂ©dĂ©ral et mĂȘme en tant que jeune femme. et journalisteâŠ
Si Olga Lavanderos a eu plus de deux petits romans -pourtant grandioses et Ă©loquents- peut-ĂȘtre les grandes compagnies du diffusion Ils auraient fait une, deux ou plusieurs sĂ©ries il y a longtemps. Ce nâest pas que BelascoarĂĄn (avec 10 titres au rĂ©pertoire Ă©ditorial de Taibo II) ne va pas bien, câest que son partenaire de recherche dans la sĂ©rie dĂ©jĂ adaptĂ©e, celle qui apparaĂźt dans le premier chapitre vĂȘtu dâune voiture de course et faisant des sports extrĂȘmes Ă surmonter un Ă©pisode dĂ©chirant et traumatisant de son enfance, il pourrait dĂ©sormais susciter plus de curiositĂ© que le personnage typique de lâhomme qui peut se permettre de renoncer Ă une vie pour poursuivre son rĂȘve de devenir dĂ©tective.
Combien de rĂ©fĂ©rences fĂ©minines manquons-nous depuis toutes ces annĂ©es. Lâimage dâune jeune fille de vingt ans, sortie du chaos littĂ©raire et existentiel de Paco Ignacio Taibo II, debout devant une fenĂȘtre ouverte sur le District fĂ©dĂ©ral de 1989, plaĂźt. Presque le mĂȘme plaisir quâOlga Lavanderos a ressenti en regardant la lĂ©gende sur ce mur sale au milieu du chaos. Et finir, comme elle, en soupirant au fond de lui-mĂȘme en pensant : « On ne mâa rien dit sur cette ville. Je lâai vue ». Et je vais vous direâŠ
Voici nos articles recommandés de la semaine :
Lâanarchiste dâorigine lituanienne, qui a grandi aux Ătats-Unis, est revendiquĂ©e comme une grande icĂŽne fĂ©ministe un siĂšcle et demi aprĂšs sa naissance.
LâĂ©crivain publie « Permis dâespionner », un livre sur de vraies femmes avec une vie cinĂ©matographique, comme la sienne.
La chanteuse chilienne basée à Madrid parle de son nouvel album, dédié au sexe explicite entre femmes, de son passage au Benidorm Fest, de la méditation et de son ami Nacho Cano.
La chanteuse qui a rĂ©volutionnĂ© le monde avec son livre âSEXâ ou son album âEroticaâ, sâaffiche dĂ©sormais en lingerie sexy et exhibe sa collection de vibromasseurs sur Instagram.
LâĂglise catholique amĂšne Benigna Cardoso sur les autels, poignardĂ©e Ă mort en 1941 alors quâelle rĂ©sistait au viol.
abonnez-vous ici aile bulletin de EL PAĂS Mexique et recevez toutes les clĂ©s informatives de lâactualitĂ© de ce pays
SOURCE : Reviews News
NâhĂ©sitez pas Ă partager notre article sur les rĂ©seaux sociaux afin de nous donner un solide coup de pouce. đ