Amoureux d’un monstre : Pourquoi sommes

Amoureux d'un monstre : Pourquoi sommes-nous si attirés par le vrai crime ?  - La troisiÚme

🍿 2022-10-23 02:25:00 – Paris/France.

Il suffit de jeter un coup d’Ɠil superficiel au catalogue Netflix pour constater son ampleur. Au cours des derniĂšres annĂ©es, les sĂ©ries, films et documentaires appartenant au sous-genre connu sous le nom de vrais crimes – histoires basĂ©es sur de vrais crimes – ont acquis une importance considĂ©rable au sein de la plateforme de Streaming.

Et ce n’est pas qu’un problĂšme d’approvisionnement. Le succĂšs de ce type d’histoires est tel qu’il n’est pas Ă©tonnant de retrouver plus d’un de ces titres se disputant les dix premiĂšres places du top mondial. Le test le plus rĂ©cent est venu de la main de deux produits inspirĂ©s par le mĂȘme boĂźtier : la sĂ©rie Dahmer – Monstre: L’histoire de Jeffrey Dahmer et la sĂ©rie documentaire Conversations avec un tueur : les enregistrements de Jeffrey Dahmertous deux basĂ©s sur la dure histoire du criminel amĂ©ricain surnommĂ© « le boucher de Milwaukee », pour son habitude de dĂ©membrer, dissĂ©quer et mĂȘme de manger les organes de ses victimes.

Les exemples ne manquent pas. Les bandes Ted Bundy (2019), Fils de Sam : Une descente aux enfers (2021)Sophie : un meurtre Ă  Cork (2021)Le serpent (2021), je viens de tuer mon pĂšre (2022), Vigilant (2022) et production nationale 42 jours dans le noir (2022) –inspirĂ© de l’affaire de l’enlĂšvement et du meurtre de Vivian Heager– Ce sont quelques-uns des produits basĂ©s sur des Ă©vĂ©nements rĂ©els qui sont disponibles sur la plateforme, qui, Ă  leur tour, ne reprĂ©sentent qu’un petit coup de pinceau de l’offre totale.

Au-delĂ  de ce que les chiffres communiquent, Plusieurs Ă©lĂ©ments peuvent aider Ă  clarifier la question de savoir pourquoi les histoires de crimes rĂ©els nous fascinent tant.. Carolina Valenzuela, psychologue mĂ©dico-lĂ©gale et directrice du Master en psychologie juridique et mĂ©dico-lĂ©gale de l’UniversitĂ© Diego Portales, souligne une sensation produite Ă  un niveau inconscient.

« Ces histoires suscitent l’intĂ©rĂȘt principalement en raison de la curiositĂ© qui implique de connaĂźtre des dĂ©tails qui, autrement, sont difficiles d’accĂšs. En tant qu’ĂȘtres humains, Ă  un niveau inconscient, la souffrance des autres gĂ©nĂšre en nous un certain calme et une certaine tranquillitĂ© : que « le mal » soit Ă  l’extĂ©rieur et arrive aux autres rĂ©affirme le sentiment de sĂ©curitĂ© et renforce Ă©galement l’idĂ©e rationnelle que, face Ă  circonstances que je vis, j’aurais agi diffĂ©remment, il est donc difficile que cela m’arrive (par exemple, se dire ‘je n’ouvrirais pas la porte Ă  un Ă©tranger’ ou ‘je ne serais pas si confiant’) », dit Valenzuela.

Ted Bundy, tueur en série. Photographie de Getty Images

Cependant, le psychologue prĂ©cise qu’il s’agit d’une rationalitĂ© qui n’a pas de sens « car il est difficile de juger le comportement d’autrui en situation de danger ou de vulnĂ©rabilitĂ©. Ces situations extrĂȘmes Ă©chappent au contrĂŽle et aux schĂ©mas cognitifs que nous avons sur la façon dont nous devrions rĂ©agir, il est donc complexe de prĂ©dire notre comportement, bien que l’analyse que nous pouvons en faire lorsque nous voyons, lisons ou Ă©coutons ces histoires nous donne tranquillitĂ© d’esprit”.

La psychologue, docteure en sciences de la santĂ© et coordinatrice du Master en santĂ© mentale mĂ©dico-lĂ©gale de l’UniversitĂ© nationale de La Plata, Elizabeth LeĂłn Mayer, est d’accord avec Valenzuela sur la pertinence de la morbiditĂ© dans l’équation, ce qui se rĂ©pĂšte de la mĂȘme maniĂšre avec d’autres genres comme les films de guerre. sous sa vision, la consommation de ce type d’histoires est liĂ©e au besoin constant des ĂȘtres humains de vivre des Ă©motions fortes.

« Nous ne nous contentons pas de regarder des films policiers. Aussi de peur, d’amour. C’est le besoin de ressentir des Ă©motions. Et regarder des films policiers vous fait ressentir de fortes Ă©motions. Ça vous Ă©meut, ça vous donne de l’adrĂ©naline et c’est amusant. Cela produit des Ă©motions en moi et ensuite je peux l’oublier. La composante traumatique n’est pas lĂ  », explique LeĂłn.

Le Docteur ajoute qu’il s’agit en outre d’un exercice exempt de jugement social. « Il permet de libĂ©rer des Ă©motions sans qu’il y ait une composante punitive derriĂšre. Au contraire, vous pouvez crier, vous pouvez dire ‘c’est horrible’, vous pouvez griffonner quand vous le regardez
 Vous pouvez dire tout cela et il n’y a aucun Ă©lĂ©ment punitif. »

Bien qu’une grande partie de son succĂšs actuel se reflĂšte dans les productions audiovisuelles, le boom du sous-genre se dĂ©veloppe depuis des annĂ©es et sur d’autres plateformes que le Streaming. Pour Christian RamĂ­rez, critique et fondateur du site Civilcinema, la fascination pour le vrai crime remonte Ă  quelques siĂšcles.

« Le genre policier est intĂ©ressant pour le lecteur ou consommateur potentiel de ces histoires depuis longtemps. L’émergence des rĂ©cits de crime remonte au milieu du 19e siĂšcle, ce n’est donc pas trĂšs nouveau. D’une certaine maniĂšre, l’essor actuel de ces rĂ©cits est devenu une sorte de continuation de cette mĂȘme formidable impulsion qui a rendu populaires tant d’écrivains au XIXe siĂšcle, et plus encore au XXe », explique RamĂ­rez.

Le critique souligne que la diffĂ©rence avec le phĂ©nomĂšne actuel rĂ©side dans le fait que, dĂ©sormais, « l’accent est mis sur le vrai crime, c’est-Ă -dire sur ce que Truman Capote et À sang froid capturĂ© si bien il y a plus de 50 ans : l’idĂ©e d’un rĂ©cit criminel qui fait rĂ©fĂ©rence Ă  des Ă©vĂ©nements rĂ©els ou qui est composĂ© de vrais personnages, de vraies victimes et de vrais indices”.

Rodrigo Munizaga, critique de sĂ©ries pour Cult, met l’accent sur la derniĂšre dĂ©cennie, en regardant notamment ce qui s’est passĂ© aux États-Unis. « Il y a eu un vĂ©ritable boom du crime au cours des 10 derniĂšres annĂ©es, et c’était particuliĂšrement Ă  la mode avec les podcasts sur le crime. Cela a poussĂ© les chaĂźnes de tĂ©lĂ©vision et de Streaming amĂ©ricaines Ă  commencer Ă  commander des sĂ©ries policiĂšres pour la fiction ou les docu-sĂ©ries. Il me semble que le phĂ©nomĂšne se focalise lĂ -bas, car au cinĂ©ma le genre policier est quelque chose de toujours », pointe-t-il.

« Cette fascination des États-Unis pour le vrai crime l’a fait atteindre l’AmĂ©rique latine, une fascination qu’au Chili on peut assimiler Ă  Mea culpa: Qu’est-ce que ce programme avait dans les annĂ©es 90 qui a balayĂ© les cotes d’écoute et le fait encore aujourd’hui ? Eh bien, la morbiditĂ©, la fascination pour la peur, pensant que ce que vous voyez « pourrait m’arriver Ă  moi ou Ă  quelqu’un que j’aime », voulant comprendre pourquoi un criminel fait ce qu’il fait. Et, au passage, de la compassion pour les victimes », ajoute le critique.

Ainsi les choses, Il n’est pas surprenant que Netflix, une entreprise qui a fait face cette annĂ©e Ă  une fuite d’abonnĂ©s, parie sur la production de ce type de contenu. « D’une certaine maniĂšre, le sous-genre est devenu plus visitĂ© dans la mesure oĂč il y a plus d’archives, plus d’accĂšs Ă  ce genre de recherche, mais aussi dans la mesure oĂč c’est moins cher que de faire un film et, finalement, parce que c’est plus intĂ©ressant. » que de faire un film de fiction », commente RamĂ­rez.

« Netflix est le Streaming le plus disposĂ© Ă  produire » Ă  la demande « ou sur la base de mĂ©triques. Le vrai crime est ce qu’on voit le plus aux États-Unis et c’est pourquoi tant de sĂ©ries et de documentaires sont produits. Ce doit ĂȘtre le pays oĂč il y a le plus de crimes et d’assassins transformĂ©s en cĂ©lĂ©britĂ©s. Et cela leur donne un grand nombre de cas possibles Ă  porter Ă  l’écran.», ajoute Munizaga.

Les deux critiques conviennent que le pays nord-amĂ©ricain Ă©tablit la norme en matiĂšre de production de certains types de contenu. « Il y a une relation absolue, mais C’est aussi une question de commoditĂ© de la part de cette plateforme qui prend le pouls de toutes ces tendances et modes qui passent. Mais le lien que le consommateur anglo-saxon, et par extension le consommateur mondial, entretient avec le vĂ©ritable genre de crime est profond.», conclut Ramirez.

Lorsqu’on entend parler d’une affaire policiĂšre, il est assez courant que l’impulsion de connaĂźtre tous les dĂ©tails derriĂšre le fait se manifeste. Cependant, il existe Ă©galement un Ă©norme intĂ©rĂȘt Ă  connaĂźtre le profil le plus intime des criminels.

Sur le plan psychologique, Valenzuela explique que cela est dĂ» au besoin de trouver une explication logique Ă  des Ă©vĂ©nements qui semblent souvent manquer de rationalitĂ©.. « Les gens doivent comprendre le comportement violent, trouver les raisons pour lesquelles cette personne a commis les crimes les plus odieux et s’assurer qu’il n’y a personne dans notre environnement qui lui ressemble. En regardant son cĂŽtĂ© intime, nous cherchons des explications sur ses actions, dans son passĂ©, dans son Ă©ducation, dans certains traumatismes, dans certaines pathologies, etc. Quelque chose doit dĂ©clencher ce comportement et tant que nous savons Ă  quoi nous pouvons attribuer la cause de leur comportement, nous sentons que nous avons le contrĂŽle, dans le sens de rendre l’exposition potentielle Ă  ces individus dangereux prĂ©visible et Ă©vitable, comme si un comportement violent Ă©tait l’effet d’une cause», explique l’universitaire.

Ces derniers temps, la tendance des vĂ©ritables productions policiĂšres a Ă©tĂ© de concentrer les histoires sur le dĂ©veloppement du criminel en tant que personnage central de l’histoire. « Il y a la dĂ©claration classique et souvent rĂ©pĂ©tĂ©e, mais rĂ©ticente, d’Hitchcock selon laquelle, pour le meilleur mĂ©chant, le meilleur film ou rĂ©cit, et je pense que d’une maniĂšre qui est vraie.», souligne RamĂ­rez, bien qu’il ajoute que le succĂšs plus ou moins grand de la recette est entre les mains de celui qui agit en tant que narrateur.

« Une sorte de clivage a Ă©mergĂ©, de dĂ©viation et de variation de la victime Ă  l’agresseur. C’est aussi Ă  moitiĂ© vieux. Il faut se rappeler qu’en À sang froid les meurtriers Ă©taient des personnages aussi importants ou plus importants que les victimes elles-mĂȘmes, ou que la reconstruction du chemin parcouru par la victime jusqu’au moment de sa mort », affirme le critique. « En effet, nous marchons sur un chemin dans cette direction. Maintenant, la chose intĂ©ressante est de savoir quelle sera la fin de ce chemin. Il pourrait s’agir directement d’une adaptation des mĂ©moires d’un criminel. »

Truman Capote, auteur de In Cold Blood.

Pour sa part, Munizaga ajoute que la formule fonctionne bien tant qu' »une certaine humanitĂ© est donnĂ©e au mĂ©chant », ce qui est trĂšs controversĂ© s’il s’agit d’un fait rĂ©el et plus susceptible d’ĂȘtre diffusĂ© s’il s’agit d’un mĂ©chant fictif.. Un cas est la sĂ©rie la chute, oĂč un agresseur et meurtrier de femmes Ă©tait un type charmant, bon pĂšre et mari, mais qui menait une double vie. Plus le mĂ©chant a de dĂ©fauts, plus il a d’accroche avec le public.

À ce stade, LeĂłn Mayer explique que cette tentative de comprendre le comportement des criminels Ă  travers la fiction n’a pas toujours un bon rĂ©sultat. Il illustre le cas de Dahmer : « Toute explication donnĂ©e concernant ce que pense le meurtrier, les gens l’acceptent comme telle. Ils n’ont pas Ă  savoir si cette explication est bonne ou mauvaise. J’ai vu Dahmer et je n’ai pas aimĂ©. Ça m’ennuyait Ă  mourir. Ils essaient d’entrer dans son cerveau, mais ils rĂ©ussissent. C’est un Ă©trange mĂ©lange de troubles mentaux, de psychopathie avec psychose, essayant d’expliquer l’inexplicable. Il n’y a pas non plus d’enquĂȘte approfondie sur l’histoire de Dahmer, tant qu’ils veulent le montrer comme un enfant maltraitĂ©, ce qu’il n’était pas. S’ils me demandaient mon avis, je ne le donnerais pas Ă  mes Ă©lĂšves pour qu’ils l’analysent ».

Valenzuela est d’accord avec le point de vue des critiques. « En gĂ©nĂ©ral, les sĂ©ries, ainsi que les films et les livres, glissent toujours explicitement ou implicitement les facteurs qui ont fait de ce sujet un » monstre « , qui a cessĂ© d’ĂȘtre une personne. » Cependant, il ajoute que «Le problĂšme avec ça c’est que


SOURCE : Reviews News

N’hĂ©sitez pas Ă  partager notre article sur les rĂ©seaux sociaux afin de nous donner un solide coup de pouce. 🍿

Quitter la version mobile