đż 2022-11-18 04:46:49 â Paris/France.
Pas de nouvelles au front Il sort gracieusement en se comparant Ă des gĂ©ants. Quand on Ă©voque les films de tranchĂ©es de la PremiĂšre Grande Guerre, la mĂ©moire de Stanley Kubrick et Chemins de gloireet si lâon ajoute Ă la formule le portrait dâune amitiĂ© au milieu des tirs de mortier, celui de lâoscarisĂ© 1917. Sauver le soldat Ryan sort de cette comparaison quelque peu inacceptable, mais la visualisation de la guerre comme expĂ©rience immersive du spectateur au combat apparaĂźt Ă©galement dans le film dâEdward Berger.
« Câest une production somptueuse et ambitieuse qui sâĂ©loigne de la notion actuelle de cinĂ©ma historique »
Pas de nouvelles au front, un film allemand qui sâest infiltrĂ© sur Netflix et qui est devenu lâun des succĂšs surprises de la sociĂ©tĂ©, qui dure des semaines sans pratiquement aucune promotion, est une production luxueuse et ambitieuse qui sâĂ©loigne de la notion de cinĂ©ma historique actuel et, par extension, du cinĂ©ma qui est dĂ©jĂ publiĂ©, semaine aprĂšs semaine Ă©galement, sur cette plateforme et sur nâimporte quelle plateforme. Il nây a pas de rĂ©visionnisme (si quoi que ce soit est lâimmersion dans le cĂŽtĂ© allemand) ni de ressources Ă la mode, ni anachronismes flagrants pour adapter le rĂ©cit de la bataille Ă lâĂ©thique et Ă lâesthĂ©tique actuelles. Ce nâest pas non plus un film facile.
« Le rĂ©alisateur allemand navigue entre lâune et lâautre notion du cinĂ©ma avec une grande aplomb, proposant au spectateur un voyage beaucoup plus dur et sinistre au cĆur de la violence »
Le film de Berger nâa mĂȘme pas le romantisme du film de Sam Mendes, malgrĂ© le recours Ă lâhistoire du passage Ă lâĂąge adulte de 1917 comme support et squelette de parcelle, et aussi, volontairement, de la force et de la sentimentalitĂ© de Spielbergbien quâil soit lâhĂ©ritier de certaines des ressources du rĂ©alisateur amĂ©ricain (ce dĂ©but, qui suit les vĂȘtements des soldats tombĂ©s au combat lors dâune vague prĂ©cĂ©dente, ou la visualisation de la bataille elle-mĂȘme, avec un meurtre au corps Ă corps mĂ©morable qui semble faire un clin dâĆil Ă lâune des sĂ©quences les plus grossiĂšres de Ryan).
Le rĂ©alisateur allemand navigue dâune notion Ă lâautre du cinĂ©ma avec une grande aplomb, proposant au spectateur un voyage beaucoup plus rude et sombre au cĆur de la violence, mais pas dĂ©pourvu de style ni de beautĂ©. Les terribles paysages naturels qui ouvrent et clĂŽturent lâhistoire de ces quatre amis qui se retrouvent face Ă lâhorreur font rĂ©fĂ©rence aux ciels orageux de Friedrich, mais il y a peu de panthĂ©isme dans lâapproche de Berger. Les nombreux dĂ©tails humains qui lâornent, en revanche, sont remarquables et reconnaissants.
Pas de nouvelles au front ce nâest cependant pas une reprĂ©sentation grossiĂšre de la PremiĂšre Guerre mondiale sans mĂ©rite crĂ©atif ou artisanal. Le fait quâon se retrouve dâabord avec quatre Ăąmes surexcitĂ©es qui, tel un artiste futuriste, dĂ©fendent lâesprit allemand dans la Grande Guerre, donne lieu Ă une seconde mi-temps orchestrĂ©e autour dâun montage parallĂšle trĂšs cinĂ©matographique, une sorte de compte Ă rebours, qui pourtant, il faut savoir apprĂ©cier : celle de la signature de lâarmistice et de la derniĂšre bataille qui serre les forces et la vie des protagonistes, une ressource que Berger utilise de maniĂšre subtile mais constante, renforçant le suspense mais orientant ses prĂ©occupations vers un autre lieu : le portrait dâune identitĂ© culturelle qui nous invite Ă nous projeter sur les dĂ©cennies suivantes que la pauvre Europe devait encore connaĂźtre.
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SOURCE : Reviews News
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